Mon bilan du Webcom automne 2010

17 novembre 2011, 8h, la douane est passée, OACI oblige (Organisation de l’aviation civile internationale), place à Najoua Kooli (@NajouaKooli) et «Un portrait de la mobilité au Québec : enjeux et défis». Directrice de projets au cefrio nous fait part des nombreuses données ramassées lors de leur plus récente enquête Netendances concernant la mobilité au Québec. D’après madame Kooli, cette enquête devrait être disponible sur leur site bientôt. Finalement on constate que le retard du Québec dans le domaine du téléphone cellulaire ordinaire n’est pas aussi prononcé dans celui des téléphones intelligents où la proportion atteint 25%, comparativement à 28% aux états unis. Outre cette statistique réconfortante, j’ai retenu les chiffres suivants (sous toute réserve, car saisis dans le feu de l’action):

  • Blackbery et iPhone dominent le marché (on s’en doutait);
  • BlackBerry pour les vieux, iPhone pour les plus jeunes, Android pour les autres;
  • 13% des adultes du Québec à internet via leurs téléphones;
  • (surprenant!) 42% des personnes possédant un téléphone intelligent n’utilisent pas internet avec leur cellulaire au Québec;
  • Dans 5 ans l’usage d’internet mobile devrait dépasser l’internet fixe;
  • 69% l’utilisent tous les jours, pour s’informer (92%), pour utiliser des services (77%);
  • 80% utilisent le courriel, 69% les SMS, 61% les réseaux sociaux, 54% regardent des vidéos, 36% jouent;
  • 44% font des transactions bancaires (l’industrie est-elle prête?);
  • 33% achètent avec leur mobile;
  • 58% utilisent la géolocalisation dont 26% géolocalisation sociale soit 3% des adultes Québécois;
  • (surprenant!) Les femmes jouent plus sur mobile et les hommes se géolocalisent plus.

En conclusion, madame Kooli lance cette question: «Les fournisseurs seront-ils prêts à offrir des forfaits permettant le développement de l’usage du mobile?» Espérons que oui et que ces chiffres les aideront à les convaincre. La journée commence bien…

Najoua Kooli

Najoua Kooli

J’assiste ensuite à la 2e conférence spéciale, «L’avenir de l’utilisabilité et du design dans un monde mobile» par Jared Spool. J’ai beaucoup entendu parler de monsieur Spool, que je suis sur Twitter depuis plusieurs années @jmspool. Fondateur et associé principal de User Interface Engineering, il nous livre une conférence teintée d’humour sur l’utilisabilité dans monde mobile. Il démontre que malgré l’adoption de plus en plus grande de ces appareils pour accéder au web, à l’aide de nombreux exemples, comment il est surprenant de constater que les mobiles soient si mal supportés sur internet. Au chapitre des cordonniers mal chaussés, il donne en exemple ATT, Verizon, Apple… dont les sites sont illisibles sur mobiles. À l’opposé, il cite les sites du Boston globe et du New York Times qui ont été optimisés pour les mobiles. Il nous parle ensuite de ligne du progrès des technologies qui met premièrement l’accent sur la technologie, ensuite les fonctionnalités pour finalement se préoccuper de l’expérience vécue par l’utilisateur. C’est à cette dernière étape qu’est rendue l’industrie du mobile. Pour bien faire comprendre ce concept, il compare un site de météo habituel comme Météo Média (fonctionnalités) et Umbrella Today (expérience). Créer une expérience, ou faire du design d’expérience nécessite des investissements et de nombreux spécialistes. Il insiste aussi sur le plaisir, un facteur essentiel de l’expérience qui fait qu’elle devient remarquable et que les gens ont envie d’en parler. Il termine sa conférence par ces messages: allez voir des utilisateurs utiliser votre produit au moins deux heures par période de six semaines, «It is time to build experiences in the mobile world» et «Celebrate learning from taking risk». Merci monsieur Spool.

Jared Spool

Jared Spool

Dominique-Sébastien Forest

Dominique-Sébastien Forest

Je me dirige ensuite vers la salle 4 pour la conférence du provocateur Dominique-Sébastien Forest, Vice-président Digital chez Transcontinental, intitulée «Le iPad sauvera-t-il l’industrie du magazine?». J’aurais dû me souvenir de son nom, j’avais déjà assisté à une de ses conférences lors d’un précédent Webcom et j’avais détesté. Ce fut encore le cas. Nous assistons à la conférence d’un personnage grossier, qui ponctue continuellement son discours de sacres et de gros mots, et imbu de lui même. Nous n’avons pas beaucoup d’atomes crochus lui et moi. Et je cite la première phrase de sa conférence, ça va vous donner le ton du reste: «Je n’habite pas sur le plateau et je n’aime pas les gouvernements interventionnistes ni le «social». On est là pour faire de l’argent». Pourtant le sujet m’intéresse et je reste dans la salle pour entendre la suite. Voici en vrac ce que j’en retins d’intéressant:

  • Transférer un modèle d’affaires (de magazine) à un nouvel appareil, les chances de succès sont minimes;
  • Un magazine iPad coûte plus de 75 mille $ à produire, la rentabilité est encore loin;
  • On va rapidement rentrer dans une phase de désillusionnement par rapport au hype du médium, d’ici 12 mois;
  • Le e-reader qui a le plus de succès commercial est encore le Kindle;
  • L’applicatif plus efficace que les sites de contenu;
  • Se réinventer en utilisant nos forces, passer du magazine à l’application;
  • Offrir une valeur ajoutée pertinente au médium;
  • La clé du succès en innovation est le capital humain (tiens, un peu d’humanité dans ce discours capitaliste???);
  • Dans 24 mois, ce qui va être hot, c’est la microprojection 3D;
  • Je pense que le modèle «application» va disparaître d’ici 5 ans.

Pour terminer, je cite une de ses dernières phrases: «Les musiciens s’en câlissent de vendre de la musique, ils veulent juste vendre des billets de spectacle».

Mon méga coup de cœur de la journée est décerné à Louise Guay qui est venue nous parler de son «Lliving Lab Mtl: Transports Urbains Intelligents». Elle entame sa conférence atypique en lançant cette belle idée: transformer la mobilité en «MOBILISATION» pour changer la ville. WOW! Quelle belle approche. J’ai le sentiment qu’il y à là un contrediscours rafraichissant dans le cadre d’un Webcom, en rupture avec le sacro-saint modèle d’affaires. J’espère que c’est une tendance qui s’amplifiera avec les prochains Webcoms. Pour cette passionnée, qui sait très bien être contagieuse avec ses idées, les transports, le moyen le plus efficace de changer la ville. Les designers ne peuvent plus prétendre être les seuls à avoir des idées novatrices. Nous sommes à l’heure de la co-création, avec des citoyens mobilisés, avec des enfants, là où on attend, là où c’est plate, dans la rue… là où sont les gens. Elle cite en exemple, la co-création d’un Casque Urbain Intelligent sur le site BixiWiki 2.0. La communauté devient force créatrice de partage de trajets, d’idées, localement et même internationalement. Une communauté de Bixiens mondiale, wow! Ici aussi un des aspects clés de l’expérience est le plaisir. Beaucoup de très belles idées dans cette conférence. En finale, des personnes dans la salle proposent spontanément la collaboration de leur organisation, dont le Collège de Maisonneuve et La société de transport de Laval. On en voudrait plus comme celle-là. Si vous avez l’occasion d’aller entendre madame Guay parler de sa passion, ne ratez pas cette chance. Le living lab de Montréal, un projet à surveiller de près. Merci!

Louise Guay

Louise Guay

À 11h30, j’ai choisi une conférence de Chrystel Black (@ChrystelBlack), cofondatrice et vice-présidente de YuCentrik, qui nous présente «Le design de services». La conférencière était pertinente dans son propos, mais la salle n’était pas adéquatement insonorisée et on entendait les gens discuter de l’autre côté du rideau. Un détail à revoir pour la prochaine édition. Pour en revenir à la conférence, madame Black nous indique que l’industrie du web est en train de passer d’une logique de produit à une autre de services, où les services 1.0 pouvaient se comparer à un magasin à rayon, les services 2.0 = ont vu se multiplier les canaux de communication et les services 3.0 devenir sémantiques, évolutifs, des expériences. Tiens, ici aussi la mode est à l’expérience… Selon elle, le service 1.0 devrait être mort le 2.0 atteindre son apogée bientôt et le 3.0 sera l’ère de l’immersion, sans complexité où le client devient «dictateur». Elle cite en exemple la compagnie Apple, une vraie entreprise Service 3.0 où tout est orienté vers la satisfaction client et où la réponse de l’entreprise au client est presque instantanée. Madame Black prétend que pour faire du bon design de services, il ne faut pas demander à l’utilisateur ce qu’il veut avoir, mais lui montrer. La manière même de concevoir les services doit s’adapter et la multidisciplinarité de l’équipe est une clé de la conception de services 3.0. Ici aussi les idées se recoupent avec ce que nous avons entendu ailleurs, Spool entre autres. Toutefois, intégrer l’approche centrée sur l’humain nécessite des changements organisationnels et ne va pas de soi dans un contexte d’entreprise. Madame Black voudrait qu’on retienne deux choses de sa conférence: #1 Dialoguez constamment avec vos clients/utilisateurs et #2 Soyez là où vos consommateurs se trouvent.

Chrystel Black

Chrystel Black

Vient l’heure du dîner. On mange bien au Webcom et encore une fois cette année, le buffet était délicieux et abondant.

Ze buffet

Ze buffet

En après-midi, j’ai choisi la conférence de Johann Romefort (@romefort), CTO de Seesmic, qui nous présente «Voyez comment le Web social favorise l’émergence du Web des données». D’entrée de jeu, il nous indique que plus de données ont été créées au cours des 3 dernières années que lors des 40 mille dernières. Ouf? Voici en vrac, quelques statistiques que j’ai retenu:

  • À ce jour 1.27 Zettaoctet de données;
  • Le jeu Zynga sur Facebook génère 1 Petaoctet de données par jour;
  • Avec le Big data viennent de nouvelles technologies pour entreposer/traiter/analyser ces données;
  • Comment être en «temps réel» dans une telle masse de données;
  • Comment remplacer/valider l’intuition par les données;
  • Chaque décision devient basée sur des mesures…

Il nous a aussi parlé de «Predictive analysis», une science qui aurait la capacité de prédire le futur avec les données actuelles. Isaac Asimov, qui a imaginé la saga Fondation sur ces idées en 1942 doit se retourner dans sa tombe. En fin de conférence, il cite en exemple l’artiste , qui produit de l’art avec des données. Intéressant retour du balancier vers l’humain.

Johann Romefort

Johann Romefort

J’assiste ensuite à «Commerce électronique : tactiques avancées» de Simon Ethier (@dotlessi), stratège en ergonomie Web chez Adviso. J’aime moins ces conférences où j’ai l’impression d’assister à un pitch de vente des services d’une compagnie. Pas beaucoup d’idées nouvelles, mais une succession de conseils issus des bonnes pratiques. Pour qui est à l’affût, on est en terrain connu et pour les autres, cela doit être une bonne introduction au sujet.

Simon Ethier

Simon Ethier

J’assiste ensuite à «L’évolution d’une application du Web au mobile» donnée par Todd Burry, le présentateur originalement prévu monsieur O’Sullivan ayant eu un empêchement pour cause de naissance de bébé. L’humanité reprend momentanément le dessus sur la techno. Il nous raconte l’histoire du portage de leur application web, le forum open source Vanilla, en application mobile. Il nous explique pourquoi ils ont choisi de développer une application web mobile plutôt qu’une application de téléphone. Ce choix a surtout été fait en fonction de l’expertise déjà en place dans la compagnie.

Pour ce qui est du blitz de speed conférencing, il m’a plutôt laissé sur ma faim. Toutefois, la conférence «Le Web 2.0 et l’illusion de la fin du politique» d’André Mondoux à contre-courant de presque tout ce qu’on avait entendu jusque-là semblait prometteuse. Malheureusement monsieur ne semblait pas à l’aise et la conférence a été interrompue après un trop bref aperçu des idées de monsieur Mondoux. Je suis très déçu, car ses paroles m’avaient mis l’eau à la bouche. Je suis convaincu qu’il est temps de donner plus de place à un autre discours, moins commercial, moins rentabilité, moins niche… Plus humain. Merci quand même André Mondoux.

En conclusion, c’est encore une autre belle journée Webcom, enrichissante à souhait. Mon souhait pour l’avenir cher programmateur, serait de laisser plus de place à des gens comme André Mondoux et Louise Guay, mon méga coup de cœur, qui représentent d’autres courants de pensée qui se situent un peu plus à l’extérieur de la boîte à l’effigie du signe de piastre.

Art Vie Design!

Philippe